Ce mois-ci Jean-Jacques Crêvecoeur nous donne un nouveau point de connaissance : Le repos : un remède aussi puissant que négligé
(article tiré du numéro 8 de Néosanté)
Dans son livre testament « On peut se dire au revoir plusieurs fois », David Servan-Schreiber faisait le bilan de son parcours de vie avec son cancer (pendant dix-neuf ans), à un moment où il pressentait que ses chances de passer au travers s’amenuisaient de semaine en semaine.
J’ai été très touché de lire qu’il ne regrettait rien de tout ce qu’il avait entrepris, de tout ce qu’il avait partagé, à travers ses deux premiers livres, ses conférences, ses émissions de radio et de TV. Il ne regrettait rien sauf une seule chose, dont il sentait qu’elle lui serait probablement fatale : il avait négligé de se reposer, d’accorder à son corps du calme, du repos, le contact avec la nature, bref, un rythme qui respecte sa biologie … Et de citer son amie canadienne Molly, atteinte comme lui d’un glioblastome de stade quatre et qui n’a connu, en dix ans, aucune rechute.
Quand on lui demande : « Qu’est-ce qui vous aide le plus à tenir la maladie à distance ? », elle répond toujours : « Le calme. C’est le calme qui me protège. »
Dans le numéro 7 de Néosanté, je vous expliquais comment l’homéostasie de notre corps oscille en permanence entre deux phases complémentaires : la sympathicotonie et la vagotonie.
Ce rythme biphasique se retrouve partout dans notre vie, à commencer par le rythme veille-sommeil.
Chaque fois que nous devons être performant pour agir, pour travailler, pour créer, pour faire du sport, pour faire l’amour, notre système orthosympathique est activé et stimule (entre autres) la production d’adrénaline et de cortisol.
Mais vient le moment où nous sentons le besoin de nous reposer, de récupérer, de nous régénérer, en faisant la sieste ou en allant dormir pour la nuit.
À ce moment, c’est le système parasympathique qui est activé et qui stimule (entre autres) la production d’acétylcholine. Au fil des jours et des nuits, des périodes d’activité et de repos, nous connaissons donc l’alternance du stress normal (dit stress positif) et de la récupération.
Remarquez qu’on retrouve cette même alternance sur des cycles plus longs, qu’il s’agisse du fameux « jour de repos hebdomadaire » qui tend malheureusement à disparaître, des congés scolaires, des vacances annuelles ou de la retraite de fin de vie. Nous le savons tous : aucun être humain, aucun animal ne peut survivre à long terme en restant bloqué en permanence sur le mode actif. Tôt ou tard, notre corps nous rappelle à l’ordre et nous impose de passer en mode de réparation.
Démarrer ses vacances par la maladie…
Entre l’âge de 28 à 40 ans, j’étais tellement passionné par mon métier que je travaillais entre 80 et 110 heures par semaine, menant de front les activités d’auteur de livres, de formateur, de conférencier, de chef d’entreprise et d’éditeur, sans compter ma vie sociale, conjugale et parentale. Curieusement, pendant mes longues périodes de travail, je n’étais jamais « malade ». Pas le temps de sortir mes poubelles alors que je courais après la performance… Jamais je n’ai dû annuler une seule conférence ou un seul séminaire. Par contre, le dernier jour de chaque trimestre, à la veille de mes vacances d’hiver ou d’été, je tombais systématiquement malade ! C’était devenu une tradition : j’expérimentais un pénible état grippal (fièvre, maux de tête, articulations douloureuses) deux fois par an, aux alentours du 20 décembre et du 13 juillet. La faute à un virus ? Que nenni ! Une gastro qui traînait par là et que j’aurais attrapée ? Pas plus ! Simplement, mon corps «savait» qu’il allait pouvoir «enfin» passer en phase de régénération après cette trop longue période de stress où je lui avais imposé un rythme irrespectueux de ma biologie…
Connaissant déjà à cette époque les travaux du docteur Hamer, j’adoptais la seule attitude qui me paraissait « bio – logique ». J’annonçais à ma femme et mes filles que j’étais malade, que mon corps avait besoin de vider ses poubelles et que je me mettais au lit le temps dont il aurait besoin. Remarquez que ce n’était pas moi qui déterminais la durée de cette nécessaire vagotonie. Je m’en remettais à la sagesse de mon corps. Ainsi, pendant deux à trois jours, je gardais le lit toute la journée, limitant mes activités à un peu de lecture. Très peu de nourriture, beaucoup d’eau, pas d’exercice, pas d’activités sexuelles, pas de télévision, beaucoup de sommeil. Les nuits, je transpirais énormément, remerciant mon corps de réagir aussi bien ! Le troisième jour, je sentais le moment précis où mon corps avait fini de récupérer. Je pouvais, à cet instant, me relever et débuter mes vacances avec mes proches dans les meilleures conditions possibles… Au cours de toutes ces années, jamais je n’ai eu recours à une seule aspirine, à un seul antibiotique, à un seul médicament. Il me suffisait d’écouter ce dont mon corps avait besoin : du repos !
Que se serait-il passer si je n’avais pas écouté mon corps et que je ne lui avais pas donné ce dont il avait besoin ? Rien de grave, en vérité. Simplement, mon état grippal se serait prolongé pendant sept à dix jours, me gâchant une bonne partie du plaisir de mes vacances… C’est tout. Vous comprenez donc mieux, à présent, pourquoi vos vacances débutent souvent par la maladie. Ça n’a rien à voir avec l’air conditionné de votre chambre d’hôtel ou avec la qualité de la nourriture locale. C’est tout simplement votre corps qui profite de vos vacances pour sortir ses poubelles !
Quand sport et guérison ne font pas bon ménage
Même si le principe est le même pour les maladies graves, comme le cancer, la manière de gérer cette fameuse phase de vagotonie est nettement plus délicate. Le docteur Hamer a démontré que plus la phase de stress (sympathicotonie) a été longue et intense, plus la phase de récupération et de régénération (vagotonie) risque d’être délicate et dangereuse pour notre corps.
Vous vous souvenez peut-être que les athlètes féminines d’Europe de l’Est se faisaient mettre enceintes à la veille des jeux olympiques pour augmenter naturellement leurs performances sportives. L’explication est simple : la grossesse équivaut à une phase de sympathicotonie. De la même manière, les personnes dont le cancer est en plein développement bénéficient de la même augmentation de performance, parce que c’est leur système orthosympathique qui est activé ! J’ai connu de nombreuses personnes qui pendant cette phase froide et silencieuse étaient dans une forme sportive et une condition physique étonnantes. Normal, l’adrénaline et le cortisol produit pendant ce temps sont des dopants tout à fait naturels !
Par contre, lorsque ces mêmes personnes basculent en phase de vagotonie (phase chaude et symptomatique), les besoins physiologiques du corps deviennent radicalement différents ! À ce moment, il a besoin impérativement de ne plus travailler, de ne plus bouger, de ne plus faire de sport intensif. Bref, leur corps doit se RE-PO-SER. Pourquoi ? Parce que, comme je le mentionnais dans mon article précédent, la loi biologique d’alternance fait que lorsque le système sympathique est activé, le système parasympathique est inhibé. Or, pour se réparer d’un cancer, le corps doit rester le plus possible en vagotonie, pour que cette phase dure le moins longtemps possible et pour qu’elle soit la moins coûteuse possible, biologiquement et physiologiquement. Chaque fois que nous nous levons pour travailler, pour regarder la TV, pour faire du sport, nous réenclenchons la sympathicotonie et nous arrêtons la vagotonie. Avec pour conséquence une prolongation inutile et dangereuse de cette phase de réparation.
Cela signifie-t-il qu’il faille cesser toute activité professionnelle, physique ou sportive ? Oui, si ces activités engendrent un stress trop élevé, un effort important ou un déplaisir manifeste. Non, si elles nous procurent un réel plaisir, un bien-être, une fluidité naturelle, le critère-clé étant ici la DOUCEUR.
En phase de vagotonie, surtout si la pathologie dont vous cherchez à vous guérir est importante, il est impératif de ne plus vous « forcer » à quoi que ce soit, même si vous pensez que faire des efforts favorisera votre guérison. David Servan-Schreiber reconnaissait lui-même : « j’ai probablement été victime de l’idéologie du stress positif ». Le sport n’est pas toujours bon pour la santé, et encore moins pour la guérison ; parfois, sa pratique trop intense peut nous mener tout droit à la mort ! C’est là que l’expression populaire « foncer à tombeau ouvert » prend un sens biologique tout à fait nouveau, mais tellement vrai !
David Servan-Schreiber l’avait bien pressenti, quelques mois avant sa mort, en écrivant : « À la lueur de ma dure expérience, je suis tenté de mettre quant à moi l’accent en premier sur l’absolue nécessité de trouver la sérénité intérieure, et de la préserver, notamment à l’aide de la méditation, des exercices de cohérence cardiaque et surtout d’un équilibre de vie qui réduise au maximum les sources de stress… » Puissions-nous tous entendre cette voix de sagesse d’un homme touchant qui a voulu aider ses semblables jusqu’au bout et dont le témoignage honnête nous montre cette voie incontournable de guérison : le repos et le calme.
Jean-Jacques Crèvecœur
Montréal
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