Aider une dame âgée à traverser au feu, consoler un ami qui s’est fait larguer, pleurer sur le sort du pauvre Leo dans Titanic… Voilà bien des choses que vous ne feriez jamais. Cela ne fait pas de vous une mauvaise personne, disons simplement que la compassion n’est pas votre fort et que oui, cela énerve vos proches. Bonne nouvelle : vous pouvez changer.
Non, le paragraphe précédent n’est pas une introduction à un tract Hare Krishna, mais bien les résultats d’une étude effectuée par des chercheurs de l’université du Wisconsin et publiée dans la revue Psychological Science. Leurs conclusions ? S’entraîner à ressentir de la compassion pour les autres, notamment à travers la méditation, permettrait de développer un certain sens de l’altruisme
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs se sont livrés à une expérience qui a fait appel à deux groupes de participants.
- Le premier groupe a dû se prêter à un petit exercice de méditation au cours duquel ils devaient se remémorer des moments de leur vie où quelqu’un leur a montré de la compassion et les a aidés à se défaire de leur souffrance. Dans le même temps, ils répétaient des litanies telles que « Sois libéré de tes souffrances. Acquiers joie et bien-être ». Enfin, ils se sont livrés à des exercices de compassion pendant lesquels ils devaient aider des amis, « des gens difficiles » (moins des amis, en fait) et eux-mêmes.
- Le deuxième groupe a appris une technique appelée « réévaluation cognitive » permettant de remodeler ses pensées de sorte qu’elles soient moins négatives. Une sorte de méthode Coué, le côté hippie en plus.
Plus compatissants
Les chercheurs ont ensuite scanné le cerveau des participants des deux groupes afin de pouvoir mesurer l’altruisme de chacun. Pour ce faire, ils ont soumis les participants à une activité qui consistait à donner de l’argent à des personnes dans le besoin.
Résultat, non seulement les personnes du premier groupe, qui se sont « entraînés » à la compassion ont été les plus altruistes, mais leurs cerveaux avaient eux aussi changé. Confrontés à la souffrance d’autrui, leur lobule pariétal inférieur (la zone du cerveau responsable de l’empathie) était plus développée. Une modification que les chercheurs n’ont pas observé chez les personnes de l’autre groupe.
Le plus étonnant ? Ces modifications cérébrales sont apparues au bout de seulement sept petites heures d’entraînement. Selon Richard Davidson, professeur de psychologie à l’université du Wisconsin et co-auteur de l’étude, cette étude serait « remarquable ». Sa collègue Helen Weng explique l’expérience en ces termes :
« C’est un peu comme soulever de la fonte. En utilisant cette approche, les participants ont pu gonfler leur « muscle » de la compassion et réagir à la souffrance d’autrui avec attention et le désir d’aider. »
Méditer pour mieux aider les autres
Vous pensez que ces chercheurs ont perdu les pédales? Détrompez-vous. En avril, une étude de Harvard et de la Northeastern University avait également souligné le lien étroit entre méditation et compassion.
Cette fois, les participants d’un premier groupe avaient été contraints de méditer pendant huit semaines, après lesquelles le test à proprement parler a pu commencer. Les autres participants ont servi de groupe témoin.
Afin de mettre la compassion de tous les participants à l’épreuve, ils ont été invité à s’asseoir dans une fausse salle d’attente en compagnie de deux personnes. La première dotée de béquilles, présentait des signes de souffrance extrême tandis que l’autre, assise sur sa chaise, restait stoïque. Inutile de préciser que les deux étaient en fait des acteur employés pour l’occasion.
Conclusion: seules 15% des personnes n’ayant pas été soumises aux 8 semaines de méditation ont aidé le souffrant, alors que plus de la moitié des participants à la phase préliminaire ont volé à son secours.
« L’aspect le plus surprenant de cette découverte est le fait que la méditation ait donné envie aux participants de se comporter de manière vertueuse, et ce même face à une norme qui nous dicte de ne pas agir ainsi, » avait alors expliqué David DeSteno, qui dirigeait l’étude. Le fait que l’autre acteur ne réagisse pas créait un effet de marginalisation qui tend normalement à réduire la volonté de se démarquer. »
Alors si vos amis vous trouvent trop égoïste et vos collègues vous détestent, vous savez désormais quoi faire: musclez vous le cerveau. Comment? Répétez après nous: « Sois libéré de tes souffrances. Acquiers joie et bien-être. Sois libéré de tes souffrances… »
Illustré par Joéliah : Copyright (c) <a href=’http://www.123rf.com’>123RF Stock Photos</a>